mercredi 22 décembre 2010

44° entretien

44° entretien
19 janvier 2012

Manet1:
Le criminel vu par la société humaine et le criminel vu par l'éthologie. En éthologie, il n'y a pas de jugement moral. Nous comparons l'humain à un arbre. Ce dernier nait d'une graine qui a été enterrée: la partie basse lance des racines vers le bas et la partie haute des feuilles et des branches. Dans quel but? La partie basse tire de la terre un certain nombre d'éléments chimiques. L'humus est le résultat d'un cycle de vie de plus de 300 à 400 millions d'années. A force de grandir et pourrir, il s'est créé une couche de 50 à 100 cm d'humus source de vie pour les plantes ultérieures au milieu de d'argile et de roches. Dès qu'un arbre se décompose, il rend à la nature tous les éléments dont il est constitué. Il est recyclé. Un vivant rejette autant de quantité de produits qu'il a ingéré mais au passage il a prélevé ce qui est nécessaire à la vie et ce que les vivants rejettent est recyclé: le lisier engraisse les champs.

Tout dépend de l'endroit où tombe la graine de la plante.Si elle se retrouve dans un espace libre, il n'y aura pas de concurrence d'autres arbres. Mais si elle tombe dans une forêt dense elle aura beaucoup de difficultés à pousser. D'autres arbres, plus grands prennent l'essentiel de la lumière. Dans les sous bois, il y a quelques gros arbres et des taillis de petites pousses. On ne dit pas que les gros arbres sont des méchants et les petits, des victimes. C'est le fonctionnement normal des vivants.
Chez les humains, chacun doit se nourrir chaque jour, qu'il se vêtisse ou se protège. Depuis un million d'années où il y avait peu d'humains par rapport à aujourd'hui, entre 100 000 et 1 million, ceux-ci ont travaillé ensemble. Ils ont créé des états, l'écriture, des bâtiments. Le résultat c'est un univers humain complexe avec des pauvres et des riches, des gens capables de diriger des entreprises ou capables d'investir des milliards d'euros et d'autres à peines capables de subvenir à leurs besoins élémentaires au jour le jour. Dans cette organisation, chacun développe un certain nombre de compétences: des musiciens, des informaticiens, des prêtres, des écrivains, des carreleurs, des monteurs. Certains chercheront toute leur vie un emploi sans en trouver et en vivotant péniblement à cause de la conjoncture, de tous les virages pris dans leur vie. Si nous tournons vers les riches, ils sont tous à couteau tiré les uns contre les autres. Parmi eux, on trouvera ce qui vivent à la limite des règles de vie. Tel PDG a détourné de l'argent, tel autre a vendu des produits dangereux sans le signaler nulle part. Et dans le passé, il y en a qui vendaient de la nourriture empoisonnée. Chaque humain court des risques. Certains se sauvent vers la grande ville et d'autres s'en sauvent. Nous trouvons donc des personnes qui dépassent des limites. Dans las années de prohibition, le gouvernement américain avait décidé d'interdire la vente de l'alcool pour des raisons sociales et religieuses. Cela a développé la mafia qui a complètement investi le secteur de l'alcool interdit. L'interdiction ne pouvait être total car les clients étaient très nombreux et la fabrication impossible à maîtriser. Il y avait une hypocrisie organisée car on pouvait se procurer du whisky médicinal par ordonnance. Les drogues dures se sont substituées comme source de revenus de toutes les mafias du monde car là aussi il y a une masse de clients en attente voire en manque et ce n'est pas si impossible à fabriquer de manière clandestine. Alors que ces produits transforment beaucoup d'humains en ruines impossibles à soigner. Dès qu'il y a des acheteurs, les vendeurs se trouvent. Mais c'est la le secret de la pérennité des mafias: tous ne sont pas pris ou tués et un certain nombre mènent de belles vies plus ou moins paisibles. Il y a toujours des humains pour choisir ce risque plutôt que de mener des vies qui leur paraissent médiocres. Plus généralement, il y a des assassins dont le but est de se débarrasser d'un gêneur qui réussissent ce qu'on appelle le crime parfait: ils ne sont pas pris.

Pour l'éthologie, tout ce que font les humains "c'est normal". Nous ne disons pas "c'est moral". Par contre, si les humains ont si bien réussi à notre époque, c'est parce qu'ils ont inventé la sociabilité et dans les domaines de la sociabilité, il y a le travail. Résultat, en 2012, quand un humain a faim il ne fait plus comme le chat qui chasse la souris, il ne sort plus dans la nature pour trouver ce dont il a besoin. Il travaille et avec l'argent qu'il a gagné il va à la boucherie et achète un morceau de viande que d'autres humains ont préparé. Si tout le monde se mettait à voler tout le monde, les humains disparaîtraient car personne ne produirait plus ce dont les autres ont besoin. Il y a donc des habitudes ou des coutumes, des méthodes et des règles. Dès l'enfance, dans certaines familles, on apprend aux enfants à dire merci. Cela signifie: "si tu as reçu une chose, tu dois en donner une autre". La justice dit que l'on n'a pas le droit de tuer, de voler - il s'agit des ressources de vie - ou de violer - il s'agit là des ressources de reproduction. Cela entraîne une condamnation -physique avec la mise en prison et morale - "c'est un méchant" de la personne qui transgresse ces habitudes et ces règles.

Pourquoi disons-nous qu'éthologiquement c'est normal alors que du point de vue de la morale et de la justice, c'est anormal?

Manet2: Celui qui subit ne peut accepter d'être traité ainsi.

Manet1: Ces méfaits peuvent passer inaperçus. Tous les soldats qui violent des femmes ennemies à la guerre ne sont pas punis. C'est la majorité des contrevenants qui rentrent au foyer sans être inquiété ni s'inquiéter.

N'est-ce pas scandaleux que l'éthologie trouve cela normal? Le génocide des juifs par les nazis est-il normal éthologiquement? Les colons européens qui ont peu à peu occupé le terrain des amérindiens en Amérique du Nord n'ont pas commis de génocide même si la population indigène est passé de 6 millions avant leur arrivée au XV° siècle à 200 000 en 1850. Ce sont les germes des maladies que les colons portaient en eux mais contre lesquelles ils étaient naturellement vaccinés - le variole, la rougeole ou la coqueluche , par exemple - qui les ont en grande partie exterminé mais pas seulement. On peut dire que l'Amérique du Nord était quasiment vide contrairement à la Palestine où les colons juifs européens continuent à affluer. Cette colonisation a soulagé l'Europe de ses famines liées au début de l'ère industrielle comme celle qu'à connu l'Irlande entre 1845 et 1849 où l'on parle d'un million de morts.C'était vrai pour les Italiens. Mais aussi pour les Suédois: 1 million d'entre eux ont quitté le pays pour les USA entre 1850 et 1890. Ceux qui sont partis aux USA y ont trouvé des conditions favorables et ceux qui sont resté ont occupé les places vacantes: leur sort s'est amélioré.Et il s'est créé un vaste marché mondial entre les USA et l'Europe qui a démultiplié les succès locaux. Les colons se sont sauvés et ont sauvés l'Europe.

Les Européens sont allés en Chine avec la même idée en tête. Mais les germes européens n'ont pas tué les Chinois: ils étaient immunisés depuis la domestication des animaux.

Manet2: La société moderne enferme celui qui tue, vole ou viole.

Manet1: Hier, quand on l'enfermait, il survivait rarement et aujourd'hui, il ne fait que mener une vie atténuée par l'interdiction de sortir d'un espace fermé où il est nourrit, blanchi et logé de telle manière qu'il peut retrouver la liberté un jour proche ou lointain. On émet l'idée de les guérir de leurs méfaits. Aujourd'hui on dépense 80 euros en moyenne pour qu'il vive. Et s'il fallait valoriser les interventions bénévoles en prison, c'est au moins le double que l'on atteindrait. Ces bénévoles se substituent inconsciemment aux enseignants et aux psychologues.

Manet2: Le rôle du bénévole est de permettre de ne pas tomber dans un système pourri. Un professionnel s'aperçoit toujours qu'il ne peut évoluer comme il le souhaiterait. Chacun est un maillon mais où il n'y a pas de coordination.
Aujourd'hui, on ne peut plus loger ni donner du travail à tout le monde. Alors on fait des textes, les services font des dossiers. Mais cela n'aboutit quasiment jamais. C'est le cœur qui parle mais il faudrait tout remettre à plat. Reconstruire ou augmenter les prisons, ce n'est pas la solution. Cela ne cessera pas de s'aggraver. Les personnes en prison sont des gens très particuliers. Les professionnels de la prison parlent même de monstres.


Manet1: Monstres, ça vient du verbe latin "monstrare", montrer. Un monstre c'est une chose qu'il faut montrer. Cela est vrai des humains qui ont de terribles déformations physiques comme on le voit dans le film "The elephant man".











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